
La Presse — Le climat ? Tout le monde en parle, en bien parfois, en mal souvent, l’expression «il n’y a plus de saisons, monsieur (ou madame)» est couramment utilisée de nos jours. Et ce n’est pas sans raison. Il suffit de lever le nez le matin et l’après-midi pour se rendre compte de la versatilité du ciel qui nous fait ressentir les chaleurs insupportables et le froid glacial le même jour, bref «il n’y a plus de saison».
A la télé, à la radio ou sur les sites, la météo est devenue très suivie et écoutée. Le changement climatique, voilà le sujet qui préoccupe aussi bien le citoyen ordinaire que les professionnels dont le métier est dépendant de la météo, comme la pêche ou l’agriculture. Les catastrophes, les bouleversements climatiques, le trouble du temps, les inondations qui suivent les fortes chaleurs, n’étonnent plus personne, les calamités naturelles s’accélèrent à un rythme rapide et croissant. Le plus dramatique c’est qu’on s’y habitue.
Il n’y a plus de saison, mais il nous reste la musique de Vivaldi pour nous consoler et nous replonger dans le tempo de l’époque pour apaiser nos ressentiments et notre colère. Les Quatre Saisons (une Humeur leur a été consacrée).
Le prêtre rouge a composé cette musique il y a trois siècles, les Saisons ont eu un succès phénoménal qui perdure jusqu’à nos jours, les concertos les plus écoutés au monde, mais peu de gens savent, qu’en parallèle, Vivaldi les accompagnés de sonnets décrivant les saisons. Le compositeur superstar, le violoniste virtuose dépeint ses compositions dans un style ordinaire, une poésie simple et convenue ; prenons le Printemps, les oiseaux chantent, le vent est doux, le petit ruisseau qui coule brisant la neige…
l’Hiver, on entend la pluie qui bat sur les carreaux pendant qu’on est au chaud… l’Eté, les ivrognes testent le vin pendant les vendanges, etc. Des images communes, illustratives, à la portée du premier amateur de poésie. Mais ce qui est intéressant et fascinant, c’est la richesse de la composition, l’illustration quasi picturale des saisons (les trilles pour le Printemps, les coups d’archet pour l’Eté…), la virtuosité du violon soliste, etc. Tous ces éléments ont contribué à la longévité du succès et son prolongement (jusqu’aux temps modernes), au point que des artistes ont profité de sa notoriété pour l’utiliser à des fins utilitaires (écologiques).
Parmi les nouveaux arrangements inspirés de la plus célèbre des musiques classiques et son lien avec le climat, il y a eu une version appelée «Les Quatre Saisons incertaines» (belle trouvaille), qui a été joué dans la ville de Vivaldi (Venise) et qui transpose magnifiquement le chef-d’œuvre dans le monde contemporain, instable, troublé sur plusieurs plans, qu’il soit climatique, émotionnel ou existentiel.
Il y a 3 ans (du 31 mai au 3 juin 2022) dans le cadre de la campagne pour le climat ActNow des Nations unies, l’Orchestre des jeunes de l’Union européenne a interprété les Quatre Saisons lors d’un concert en Grèce, donné sur l’île mythique de Delos (berceau d’Apollon et d’Artémis).
Dans le but de sensibiliser les hommes aux enjeux climatiques, il y a de la place, à notre avis, à des initiatives pareilles ou proches dans notre pays, c’est imaginable et réalisable dans le cadre d’un festival ou d’une opération de promotion d’une région ou d’un site ; dans une île ou dans le désert en automne, ou encore sur une plage l’été, en montagne le printemps. Rêvons !